Texte écrit par Kim Térrault, étudiante en nutrition
Depuis quelques années, l’alimentation végétale est de plus en plus adoptée, avec ses bienfaits sur la santé et sur la planète bien démontrés par la science. En effet, une transition vers le végétarisme aurait le potentiel de réduire les terres utilisées pour l’alimentation de 76% et les émissions de gaz à effet de serre de 49% [1]. Dans une étude de la firme Léger en 2019, environ 9% des Canadiens ont déclaré avoir une alimentation végétarienne (A) ou végétalienne (B) (ce qui équivaut à environ 3 millions de personnes) et 26% ont rapporté être flexitariens (C) (ce qui équivaut à près de 10 millions de personnes) [2]. Il est donc possible de constater que la consommation de produits d’origine animale est en diminution dans la population, ce qui est un bon pas vers une alimentation plus durable! Mais le végétarisme et le végétalisme peuvent-ils convenir aux enfants? Cet article vise à clarifier certaines informations sur l’alimentation végétale et à vous outiller par rapport à l’intégration de protéines végétales au quotidien dans un contexte familial.
A. Ce régime exclut la viande, la volaille et le poisson. Il existe des sous-catégories, telles que les lacto-ovo-végétariens (produits laitiers et œufs autorisés), les lacto-végétariens (seulement les produits laitiers autorisés), les ovo-végétariens (seulement les œufs permis), les pesco-végétariens (produits laitiers, œufs et poisson autorisés).
B. Tous les produits d’origine animale sont exclus, au-delà de l’alimentation (viande, volaille, poisson, produits laitiers, œufs, miel, gélatine, cuir etc.)
C. Régime végétarien la plupart du temps qui permet viande, volaille et poisson à l’occasion.
Est-ce qu’un enfant qui ne consomme pas de viande peut combler ses besoins nutritionnels?
Une croyance fréquente par rapport au végétarisme et au végétalisme est que ces régimes entraînent des carences nutritionnelles. Toutefois, il a été démontré qu’une alimentation végétale équilibrée peut être adéquate pour tous les cycles de la vie, que ce soit durant la grossesse, la lactation, l’enfance, l’adolescence ou l’âge adulte [3] [4]. Un enfant végétarien ou végétalien peut donc se développer et grandir adéquatement [5] [6] [7]. La végétalisation de l’alimentation n’entraîne pas systématiquement des carences, mais l’alimentation de l’enfant végétarien se doit d’être équilibrée afin d’aller chercher tous les nutriments nécessaires à sa croissance, particulièrement chez les végétaliens stricts [7]. On fait référence ici aux protéines, aux acides gras oméga-3, au fer, au zinc, au calcium et aux vitamines B12 et D, des nutriments qui sont majoritairement retrouvés dans les aliments d’origine animale.[4] [6] [7]. Notons toutefois que la grande majorité des besoins en ces nutriments peuvent être comblés via la consommation d’aliments nutritifs et variés. Voici un tableau qui regroupe les informations importantes sur ces nutriments et leurs sources principales, tirées de Naître et grandir et des Diététistes du Canada [6] [8] [9]:
Aussi, pour s’assurer que les besoins en énergie sont comblés, il est conseillé de servir des aliments denses en énergie quotidiennement, comme des beurres de noix, des avocats et du fromage (si autorisé) et de compléter les repas avec des collations nutritives [5] [7]. Il est également recommandé d’offrir à son enfant une variété de produits céréaliers, à grains entiers et raffinés, pour permettre la consommation d’autres aliments nutritifs.
Bref, en suivant ces recommandations, un enfant ou un adolescent peut suivre un régime végétarien ou végétalien sans présenter de carences nutritionnelles. Il s’agit toutefois d’informations à titre indicatif. Il est donc pertinent de consulter un ou une nutritionniste pour s’assurer que l’alimentation de votre enfant est équilibrée et qu’elle comble ses besoins en nutriments.
Faut-il manger tous ces aliments tous les jours ?
Il n’y a pas de règles fixes quant aux aliments à consommer sur une base quotidienne pour les végétariens ou les végétaliens. Il importe toutefois d’avoir dans l’assiette des aliments de chaque groupe d’aliments du guide alimentaire canadien (fruits/légumes, féculents, aliments protéinés), en s’assurant d’incorporer des aliments denses énergétiquement pour les enfants (ex. : beurres de noix, avocats, fromage, etc.). En choisissant une variété d’aliments de chaque catégorie dans le menu de la semaine, les différents éléments nutritifs seront fournis en quantité suffisante. De plus, pour les enfants, certains aliments sont à privilégier au quotidien pour assurer le développement et la croissance, comme des aliments riches en fer et des produits laitiers ou boissons végétales enrichis en vitamine D et calcium. Pour les végétaliens, consommer quelques fois dans la semaine des aliments enrichis en vitamine B12 comme la levure alimentaire permettra de combler les besoins en cette vitamine.
Y a-t-il des suppléments obligatoires à consommer si on adopte une alimentation végétale ?
Comme mentionné dans la section précédente, les besoins nutritionnels peuvent être comblés avec une alimentation équilibrée et structurée. Il n’y a donc pas de supplémentation systématique pour un enfant ou un adulte végétarien ou végétalien. Par contre, il y a certains nutriments pour lesquels il peut être plus ardu de combler ses besoins seulement avec des aliments, particulièrement lorsque les produits laitiers et les œufs ne sont pas consommés, comme le calcium, la vitamine B12, le fer et la vitamine D. À ce moment, après une évaluation par une nutritionniste ou par un professionnel de la santé, il peut être nécessaire de se tourner vers des suppléments alimentaires temporairement (par exemple durant une phase de croissance rapide) ou sur une plus longue période.
Comment intégrer davantage de protéines végétales dans l’alimentation de la famille au quotidien?
La cuisine végétale peut paraître intimidante à première vue. Il s’agit avant tout de nouveaux aliments, autant pour les adultes que les plus jeunes! Voici quelques astuces pour faciliter l’intégration de mets végétariens dans votre menu familial [5] :
- Discuter en famille de vos raisons de consommer davantage d’aliments d’origine végétale. Il peut être intéressant d’échanger avec les enfants par rapport à leurs connaissances sur ce sujet selon leur âge.
- En apprendre plus sur la cuisine végétale avec des livres de recettes, des émissions, des blogues, les sections végétariennes des sites web de recettes, etc. Il existe plusieurs ressources très intéressantes pour s’initier à ce type de cuisine, comme La cuisine de Jean-Philippe, Loounie cuisine, Ma cuisine de tous les jours et plein d’autres !
- Cuisiner en famille pour créer un premier contact avec les nouveaux aliments avant le moment du repas.
- Conserver des aliments appréciés et familiers au menu.
- Substituer graduellement la viande par des protéines végétales, comme du tofu, du tempeh, des légumineuses, de la protéine végétale texturée (PVT), etc. dans vos mets familiaux préférés. La famille pourra donc se familiariser avec le goût et la texture des nouveaux aliments.
Devons-nous être végétariens de façon stricte ?
Le végétarisme, quelle que soit sa forme, demeure avant tout un choix personnel et il est tout à fait possible de conserver une certaine flexibilité dans son alimentation. Les recommandations de base pour une saine alimentation demeurent les mêmes, peu importe notre régime : cuisiner plus souvent, limiter la consommation d’aliments ultra-transformés, manger en bonne compagnie, savourer les aliments, etc. Qu’on soit végétarien strict ou plutôt flexitarien, chaque geste compte pour réduire notre consommation de viande. Un article publié en 2023 a démontré que l’impact environnemental d’une personne qui consomme peu de viande serait différent d’au moins 30% de celui d’un grand consommateur de viande [10]. On ne perd donc rien à découvrir les aliments d’origine végétale et à leur faire une place au quotidien!
Références
RÉFÉRENCES
[1] Gibbs, J., & Cappuccio, F. P. (2022). Plant-Based Dietary Patterns for Human and Planetary Health. Nutrients, 14(8), 1614. https://doi.org/10.3390/nu14081614
[2] Légaré, C.A., Lacharité, S. (2020). Les protéines végétales : Un nouveau débouché pour l’industrie québécoise ?. Bioclips, 28 (16). https://www.mapaq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/Bioclips/BioClips2020/Volume_28_no16.pdf
[3] Kiely, M. E. (2021). Risks and benefits of vegan and vegetarian diets in children. Proceedings of the Nutrition Society, 80(2), 159‑164. https://doi.org/10.1017/S002966512100001X
[4] Melina, V., Craig, W., & Levin, S. (2016). Position of the Academy of Nutrition and Dietetics: Vegetarian Diets. Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics, 116(12), 1970‑1980. https://doi.org/10.1016/j.jand.2016.09.025
[5] Creighton, C. (2010). Vegetarian nutrition for school-aged children. Academy of Nutrition and Dietetics.
[6] Diététistes du Canada. (2015). Lignes directrices sur alimentation saine pour votre enfant végétarien de 4 à 13 ans.
[7] Amit M. (2010). Les régimes végétariens chez les enfants et les adolescents. Paediatrics & Child Health, 15(5), 309–314. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2912618/
[8] Côté, S. (2019). Les protéines dans l’alimentation des enfants. Naître et grandir. https://naitreetgrandir.com/fr/etape/0_12_mois/alimentation/proteines-alimentation-enfants/
[9] Côté, S. (2019). Le végétarisme et le végétalisme. Naître et grandir. https://naitreetgrandir.com/fr/etape/1_3_ans/alimentation/bg-naitre-grandir-enfant-alimentation-vegetarienne/#_Toc24447323
[10] Scarborough, P., Clark, M., Cobiac, L., Papier, K., Knuppel, A., Lynch, J., Harrington, R., Key, T., & Springmann, M. (2023). Vegans, vegetarians, fish-eaters and meat-eaters in the UK show discrepant environmental impacts. Nature Food, 4(7), 565‑574. https://doi.org/10.1038/s43016-023-00795-w