Publié le

Jeûner, la clé pour perdre du poids ?

Par Vicky Boutin, stagiaire en nutrition

Diètes miracles, culte de la minceur, omniprésence de corps cadrant dans les standards de beauté sur les réseaux sociaux et valorisation des sports de performance ne sont que quelques exemples du contexte dans lequel nous vivons. Ces facteurs sociétaux augmentent la préoccupation de plusieurs vis-à-vis leur poids et les orientent vers des solutions parfois dangereuses pour retrouver minceur, bien-être et santé.

Mais qu’est-ce que la santé ?

D’abord, il faut savoir que la santé est un terme général; il inclut la santé physique, mentale et sociale. Il y a donc plusieurs composantes qui affectent la santé d’une personne et le poids n’en est qu’une infime partie. Alors, le poids d’une personne permet-il vraiment de connaître son état de santé ? La réponse est NON. Une personne en surpoids qui fait de l’activité physique et s’alimente de façon convenable a fort probablement plus d’énergie et de force qu’une personne mince qui est inactive et qui s’alimente mal. Le poids et la santé ne sont pas des éléments de cause à effet. L’un ne dépend pas de l’autre, il est donc important d’en être conscient avant de commencer une tentative de perte de poids.


Qu’est-ce que le jeûne ?

Il existe plusieurs types de jeûne; les deux principaux sont le jeûne intermittent et le jeûne strict (de courte durée ou prolongé). Pour sa part, le jeûne intermittent consiste à alterner les périodes de jeûne avec des périodes de prise alimentaire. Il se différencie du jeûne strict qui, pour sa part, n’autorise aucune prise alimentaire mis à part de l’eau, des tisanes ou des bouillons. On parle de jeûne de courte durée lorsqu’il dure moins de deux jours et d’un jeûne prolongé lorsqu’il dure plus de deux jours. Au-delà d’une semaine de jeûne ou dès que l’on a une condition particulière, une surveillance médicale est requise pour surveiller la santé cardio-vasculaire et la pression artérielle.


Le principe

Lorsqu’il est privé d’aliment pendant une période prolongée, l’organisme utilise alors ses propres réserves comme ressources. D’abord, ses réserves de glucose qui s‘épuisent assez rapidement. Puis, ses réserves de lipides dans le tissu adipeux. Enfin, il utilise ses réserves de protéines, ce qui entraîne une diminution de la masse musculaire.

Le jeûne court ne semble présenter aucun danger. En revanche, lorsque le jeûne est prolongé, il provoque rapidement une dénutrition qui cause une perte de masse musculaire. En fait, aucune protéine n’est apportée par la voie de l’alimentation et l’organisme doit utiliser les protéines dans ses muscles pour survivre. S’il est mal contrôlé, le jeûne prolongé peut avoir des conséquences néfastes comme de la fièvre, des maux de tête, des coliques ou des vomissements. Par ailleurs, ses effets ne sont pas insignifiants. Il peut engendrer un déficit du système immunitaire, des carences en vitamines et minéraux, un déséquilibre électrolytique et dans certains cas extrêmes, un décès. Avant de vous lancer dans une telle pratique, assurez-vous de consulter un médecin ou une nutritionniste.

Comme je l’ai mentionné précédemment, le jeûne intermittent consiste à alterner les périodes de prises alimentaires, durant lesquelles la personne peut manger ce qu’elle veut, avec des périodes de jeûne (d’au moins 14 heures). Il en existe plusieurs types comme le 16/8, qui demande de jeûner pendant 16 heures par jour, ou le 5 : 2 qui consiste à jeûner 2 jours par semaine. 


À prendre avec un grain de sel

Jusqu’à maintenant, les études ayant examiné l’impact du jeûne intermittent sur la perte pondérale comptaient peu de participants et évaluaient les résultats à court terme. Il ne faut donc pas se laisser émerveiller par ces résultats qui ne reflètent malheureusement pas des pertes de poids permanentes.

De plus, les études qui établissent un lien avec la perte de poids sont souvent des études qui proposent une restriction calorique aux participants, c’est alors cette restriction qui est à l’origine de la perte de poids plutôt que le jeûne en soi. Finalement, lors du jeûne intermittent, il y a une réduction des apports alimentaires en soirée, ce qui limite le grignotage et diminue l’apport calorique total pour la journée. Les aliments consommés en soirée étant souvent riches en gras saturés (croustilles, popcorn, chocolat, bonbons), cela peut avoir un impact sur le poids de l’individu.


ATTENTION !

Il faut savoir que chaque corps réagit différemment, donc si le jeûne intermittent fonctionne pour vous, rien ne vous empêche de continuer. Cependant, vous devez vous assurer de continuer à manger de façon équilibrée et en quantité suffisante. En effet, c’est un défi de combler ses besoins nutritionnels pour l’ensemble d’une journée, mais ce l’est encore plus de le faire dans un court laps de temps, car chaque bouchée compte! N’hésitez pas à consulter une nutritionniste qui saura vous accompagner adéquatement dans votre démarche.

De plus, pour certaines personnes, le jeûne peut être dangereux ou amener des comportements alimentaires indésirables. Effectivement, le jeûne amène une restriction obligatoire à ne pas s’alimenter pendant une certaine période, ce qui peut être néfaste pour une personne ayant une relation plus difficile avec la nourriture. Par ailleurs, voici la liste des populations chez qui le jeûne devrait être évité :

  • les diabétiques
  • les enfants
  • les adolescents
  • les personnes ayant un trouble alimentaire
  • les femmes enceintes
  • les personnes avec une médication devant être prise avec de la nourriture
  • les personnes âgées

Il faut garder en tête que jeûner n’est pas un régime, mais plutôt une façon de s’alimenter. La motivation sera donc assez difficile à maintenir si la perte de poids est le seul objectif de la démarche.



CONCLUSION

En conclusion, on nous vend des produits miracles et on nous propose des régimes rapides et sans effort parce que le rêve attire davantage que la réalité. Il est alors intéressant de se demander qui offre le produit et dans quel but il souhaite le vendre. La meilleure façon de perdre du poids est d’adopter des habitudes de vie que vous pourrez maintenir dans le temps. Pourquoi adopter des solutions à court terme si vous souhaitez avoir des effets à long terme? Il est plus facile de modifier le chiffre sur la balance que de changer la perception de son corps et de viser le bien-être, mais ce sont pourtant les changements les plus durables.

Cela passe par une alimentation qui nous procure l’énergie nécessaire pour réaliser toutes les activités de notre journée et la pratique d’activité physique régulière pour maintenir notre corps et notre esprit à leur pleine capacité.


Références

  • Dong TA, Sandesara PB, Dhindsa DS, Mehta A, Arneson LC, Dollar AL, Taub PR, Sperling LS. Intermittent fasting: a heart healthy dietary pattern? Am J Med. 2020;133(8):901–907.
  • Leonie K Heilbronn, Steven R Smith, Corby K Martin, Stephen D Anton, Eric Ravussin, Alternate-day fasting in nonobese subjects: effects on body weight, body composition, and energy metabolism, The American Journal of Clinical Nutrition, Volume 81, Issue 1, January 2005, p. 69–73, https://doi.org/10.1093/ajcn/81.1.69
  • Welton S, Minty R, O’Driscoll T, Willms H, Poirier D, Madden S, Kelly L. Intermittent fasting and weight loss: Systematic review. Can Fam Physician. 2020 Feb;66(2):117-125. PMID: 32060194; PMCID: PMC7021351.
  • Harris, L; Hamilton, S; Azevedo, L.B; Olajide, J; De Brún, C; Waller, G; Whittaker, V; Sharp, T; Lean, M; Hankey, C; Ells, L. Intermittent fasting interventions for treatment of overweight and obesity in adults: a systematic review and meta-analysis, JBI Database of Systematic Reviews and Implementation Reports: February 2018 – Volume 16 – Issue 2 – p 507-547 doi: 10.11124/JBISRIR-2016-003248