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Alimentation intuitive : nourrir son bien-être

Par Clémence Desjardins, stagiaire en nutrition

L’alimentation intuitive est un sujet de plus en plus abordé sur les médias sociaux et une approche avec laquelle plusieurs nutritionnistes choisissent maintenant de travailler. C’est un principe de base très simple et qu’à peu près tout le monde pratiquait inconsciemment dans sa jeunesse, mais qui est beaucoup plus difficile à suivre dans la société d’aujourd’hui. En effet, l’omniprésence de la culture des diètes et des technologies, l’importance accordée à la productivité ainsi que notre désir que tout soit instantané ne sont que quelques facteurs faisant en sorte que nous sommes de plus en plus déconnectés à nos signaux de faim et de satiété, rendant l’acte de manger extrêmement complexe. L’alimentation intuitive se veut donc une façon d’aborder la nourriture plus simplement, en évitant les régimes et en se fiant à notre corps comme principal outil pour guider nos choix.

Qu’est-ce que l’alimentation intuitive?

Selon le Multi Dictionnaire de la langue française (2009), l’intuition est la « connaissance directe et immédiate qui ne s’appuie pas sur la raison », ce qui signifie globalement d’utiliser ses sens plutôt que sa tête pour prendre des décisions. Donc mis simplement, l’alimentation intuitive est une façon de manger qui encourage la reconnaissance et l’écoute de ses signaux corporels pour se nourrir. Cette approche va ainsi à l’encontre de la culture des diètes et favorise une relation plus positive avec la nourriture et son corps. Donc ce n’est pas une diète, alors l’objectif n’est pas la perte de poids à tout prix, mais plutôt l’amélioration de la santé, tant physique que mentale.

L’approche a été développée pour la première fois par les nutritionnistes Evelyn Tribole et Elyse Resch dans leur livre «Intuitive Eating, a Revolutionary Program that Works» (l’alimentation intuitive, une approche révolutionnaire qui fonctionne – traduction libre), publié en 1995.


Pourquoi est-ce si difficile?

Tout le monde (à quelques exceptions près) mangeait de façon intuitive lorsqu’il ou elle était jeune. À cet âge, on écoute nos signaux de faim et de satiété très efficacement et sans se poser de question. Mais en grandissant, nous apprenons des «règles alimentaires» qui nous déconnectent peu à peu avec ce que nous ressentons physiquement en mangeant. Par exemple, on apprend qu’il faut toujours finir son assiette, que certains aliments sont « mauvais » et devraient être évités. En plus, plusieurs composantes de notre environnement favorisent ces comportements, comme la nécessité d’être toujours productif et efficace, les technologies qui sont partout et nous distraient constamment, la culture des diètes qui nous enseigne que notre corps n’est jamais assez « parfait », et la liste est encore longue.

Même si chaque personne est née avec les outils nécessaires pour reconnaître ses signaux internes de faim et de satiété, il est facile de se «déconnecter» de ceux-ci considérant toutes les influences extérieures auxquelles nous sommes confronté.es de façon perpétuelle. Et une fois que le dommage est fait, il est possible, mais difficile, de retrouver l’intuition de notre enfance.



Par où commencer?

S’il s’agit d’un sujet qui vous intéresse et que vous aimeriez le mettre en application pour vous-même, vous pouvez commencer par essayer de manger plus consciemment. Pour ce faire, vous pouvez manger plus lentement, prendre le temps de bien mastiquer et de savourer vos repas ainsi qu’éviter les distractions (c’est-à-dire de ne pas écouter la télévision ou d’être sur les réseaux sociaux pendant un repas, par exemple). Vous pouvez aussi prendre des moments d’arrêts avant, pendant et après avoir manger pour vous questionner sur vos niveaux de faim et de satiété en utilisant l’échelle de la faim. Cela vous permettra de prendre conscience de ce dont votre corps a réellement besoin pour pouvoir le nourrir en conséquence.


Il faut aussi adopter une façon neutre de voir les aliments, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de bons, ni de mauvais aliments. En fait, il n’est pas faux de penser que certains aliments sont plus nutritifs que d’autres. Par exemple, le pain brun contient effectivement plus de fibres, de protéines et de minéraux que le pain blanc. Cependant, cette  «neutralité» signifie plutôt que tous les aliments doivent avoir la même valeur sentimentale. Ainsi, il n’y a pas d’aliments interdits et pas d’aliments qui doivent absolument être consommés chaque jour.

Si vous souhaitez comprendre cette approche plus en détail ou que vous croyez avoir une relation difficile avec l’alimentation, il serait intéressant de consulter une nutritionniste. Celle-ci saura vous guider pour retrouver votre liberté alimentaire et vous offrira un suivi personnalisé qui vous permettra de faire le tout de la bonne façon.


Mais comment ne pas «perdre le contrôle»?!

En lisant sur le sujet, on peut se demander comment les personnes qui suivent ces principes font pour ne pas manger de la pizza, des beignes et du gâteau en tout temps. Si tout est permis et qu’elles se fient à leur intuition et à ce dont elles ont réellement envie, il semble normal de penser qu’elles ne vont manger que de la «mal» bouffe, non? Et bien la vérité est que, c’est possible, et il faut même s’y attendre, surtout si ces personnes vivent dans la restriction alimentaire depuis plusieurs années et qu’elles se donnent finalement la permission de manger inconditionnellement. Si on nous interdit de manger quoi que ce soit, cet aliment devient immédiatement plus attrayant et désiré, alors que faisons-nous lorsqu’il est enfin «hors limites»? Nous en mangeons beaucoup plus que ce qui pourrait être considéré comme une portion standard. Et ceci est une réaction tout à fait normale.

Par contre après un certain temps à manger ainsi et en étant à l’écoute de comment elles se sentent, ces personnes commenceront à réaliser que de manger ainsi régulièrement peut les faire sentir plus ou moins bien. Ceci sera un signal de leur corps qui les encouragera à manger davantage d’autres types d’aliments.


L’alimentation intuitive nous permet d’être capable de déterminer ce dont on a envie de manger, en quelle quantité et à quel moment. Mais il faut aussi prendre note et respecter la façon dont notre corps réagit lorsque nous consommons certains aliments, et ce, dans le but de se sentir le mieux possible, le plus souvent possible. Par exemple, il se peut que certaines personnes ne digèrent  pas très bien certains légumes. Ainsi, même si elles apprécient leur goût et qu’elles savent que ces aliments sont très nutritifs, elles pourraient choisir de ne pas en manger, puisque cela ne les fait pas sentir à leur meilleur.


En conclusion…

L’alimentation intuitive est une façon de s’alimenter ayant pour but de faire la paix avec la nourriture et son corps en se donnant la permission de manger de façon inconditionnelle. Dans un monde allant à toute vitesse et qui nous incite à ignorer nos signaux de faim et de satiété, cette approche peut offrir une belle opportunité de reprendre contact avec notre corps et d’éviter de tomber dans le cercle vicieux des diètes.


Pour en savoir plus


Références

De Villers, M. (2009). Intuition. Dans le Multi dictionnaire de la langue française.

Frankel, E. et Matz, J. (2004). Beyond a Shadow of a Diet: The Therapist’s Guide to Treating Compulsive Eating Disorders. Routledge.

Harvard Women’s Health Watch. (2016, janvier). 8 steps to mindful eating. https://www.health.harvard.edu/staying-healthy/8-steps-to-mindful-eating.

Rumsey, A. (2019, 14 juin). What is intuitive eating?. https://alissarumsey.com/intuitive-eating/what-is-intuitive-eating/.

Sharp, A. (2020, 13 août). WILL INTUITIVE EATING HELP ME LOSE WEIGHT AND OTHER COMMON FAQ. https://www.abbeyskitchen.com/will-intuitive-eating-help-me-lose-weight/.